Canal du Midi : une union pas si sacrée que ça pour le vaccin des platanes – L'Officiel du Canal du Midi

Canal du Midi : une union pas si sacrée que ça pour le vaccin des platanes

une-union-pas-si-sacree-pour-le-vaccin-des-platanes_769033_510x255
ANTOINE CARRIE
30/12/2013, MIDI LIBRE
Comment faire accepter une alternative à l’abattage si le vaccin est un succès ? (N. A.-V.)

Faut-il tenter de vacciner les platanes du canal du Midi ? Entre la filière bois et les scientifiques, le sujet divise.

« Une avancée sérieuse, même si ce n’est pas gagné. » En évoquant la réunion qui rassemblera le 15 janvier les Voies navigables de France (VNF), le Centre d’expertise en techniques environnementales et végétales (Cetev), l’agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) et le ministère de l’Agriculture, le sénateur audois Roland Courteau affichait une judicieuse prudence.

Un long chemin à parcourir

Car si le rendez-vous doit enfin permettre d’aborder la question du test d’un traitement phytosanitaire contre le fléau du chancre coloré qui ravage les platanes du canal du Midi, l’union sacrée tant appelée de leurs vœux par les maires de Sallèles-d’Aude Yves Bastié, et de Castelnaudary, Patrick Maugard, a encore devant elle un long chemin à parcourir.

« Une seule solution, l’abattage : comment pouvez-vous affirmer une telle ineptie ? »

En témoigne l’acerbe échange lu dans les colonnes des Nouvelles feuilles forestières (NFF), parution trimestrielle des propriétaires forestiers privés du Languedoc-Roussillon. Une publication à laquelle Yves Bastié s’était autorisé à adresser un courrier des lecteurs, publié dans le numéro de décembre des NFF.

Une missive dans laquelle l’élu audois, farouche partisan du vaccin, s’étonnait vertement de termes employés dans le précédent numéro du trimestriel : « Quelle n’a pas été ma surprise en lisant votre article paru dans le n° 115 de septembre 2013. Dans votre écrit sur la maladie des platanes du canal du Midi, un intertitre en rouge et en gros assure : “Une seule solution : l’abattage” (…). Comment pouvez-vous affirmer une telle ineptie ? N’avez-vous pas cherché d’autres informations que celles données par VNF ? Ne vous êtes-vous pas renseigné sur de possibles traitements alternatifs ? »

La charge, virulente, n’a visiblement pas été du goût des NFF. Qui répondent tout aussi sèchement qu’après avoir consulté « le Département de la santé des forêts » et relu « la documentation sur les produits, les tests et les laboratoires auxquels vous faites référence », ils maintiennent que « dans l’état actuel des connaissances, la seule solution pour résorber ou limiter la propagation du chancre coloré reste l’abattage des arbres ».

Des années d’expérimentation nécessaires ?

Et de faire référence à l’avis exprimé par les expérimentateurs de ces vaccins, livré dans une autre revue spécialisée, Phytoma, en mars 2013 : « Ils expliquaient eux-mêmes qu’ils étaient “conscients que des expérimentations sur plusieurs années sont nécessaires” avant de pouvoir conclure sur l’efficacité des méthodes. »

Première précision livrée, avant de souligner que la technique du Cetev, pressenti pour élaborer un protocole de traitement, a publié un article sur le sujet. Publication précisant que le suivi des sept arbres bénéficiaires de l’injection du fameux produit fongicide a été interrompu après leur abattage (après 13 mois, Ndlr). Un argument de plus pour les NFF pour répéter une dernière fois « qu’il ne serait pas honnête de dire et de laisser croire à nos lecteurs qu’il existe aujourd’hui une alternative à l’abattage des platanes ».

Avant de s’autoriser une chute magnanime, pour juger « intéressant » le test scientifique dont il sera justement question le 15 janvier, au ministère. Un échange musclé, pour dire les embûches à passer avant que l’injection, si elle s’avère être le produit miracle, ne soit adoptée et généralisée. Et la filière bois n’est pas la seule à rivaliser de pessimisme. André Vigouroux, le père des Platanors, ces platanes résistants nés de ses recherches à l’Inra, aujourd’hui collaborateur des pépinières qui ont l’exclusivité de ces arbres “miraculeux”, s’était déjà penché sur la technique du Cetev.

Quid des Platanors si le vaccin s’avère être une réussite ?

Pour préciser que l’exposé des premiers résultats, avec un ralentissement de l’infection, rappelait les expérimentations menées par le Dr Panconesi. Un spécialiste italien du platane qui, en 1981, avait conclu que la technique ne faisait que retarder l’inéluctable.

Un avis guère encourageant, et en arrière-plan une question loin d’être innocente : quid de la vente ces Platanors, dont les pépinières Rouy-Imbert ont engagé la commercialisation de l’Italie à l’Allemagne, en passant par l’Espagne et la Belgique ? Une question qui peut être évidemment étendue aux autres essences vouées à remplacer les 42 000 platanes annoncés comme condamnés depuis des années. De quoi forcément déclencher quelques inquiétudes du côté des producteurs…