A peine les paysages du Canal du Midi classés au patrimoine de l’UNESCO que déjà les membres de l’association Toulouse au fil de l’Ô s’inquiètent de les voir déclasser. Le club économique évoque de multiples dangers qui pourraient aboutir à cette décision dans deux ans.
Depuis le 26 septembre, tous les paysages du Canal du Midi sont labellisés, par décret gouvernemental « Ensemble remarquable qui mérite la reconnaissance nationale », ce qui représente un pas de plus pour la valorisation de ce patrimoine qui n’avait été classé que partiellement en 1996.
La présidente de Toulouse au fil de l’Ô, Valérie Piganiol, s’en réjouit mais craint déjà que ce classement ne soit qu’éphémère si les pouvoirs publics n’agissent pas en conséquence pour le préserver.
Magalie Lacombe : Qu’est-ce qui menace ce classement selon vous ?
Valérie Piganiol : Ce patrimoine qui concerne aussi la voûte végétale du Canal du Midi est menacé par le chancre coloré et aujourd’hui, la seule solution que proposent les pouvoirs publics est l’abattage et le replantage. Ce petit champignon [dont trois nouveaux foyers viennent d’être détectés à Castanet Tolosan, Avignonet Lauragais et Gardouch], ce sont des spores qui volent et donc quand quelqu’un agraphe quelque chose sur un platane du Canal du Midi, il favorise la transmission de ce champignon (…) Il y a aussi le non entretien de tous les ouvrages d’art que sont les maisons éclusières parce que les budgets sont déjà rabotés depuis une vingtaine d’années. Le Canal du Midi est là, c’est très bien, on en profite mais on manque de moyens.
Rien que pour replanter, on a besoin de 250 à 400 millions d’euros donc on est loin du compte – Valérie Piganiol, présidente du club économique Toulouse au fil de l’Ô
Plus de 3.3 millions d’euros ont été recueillis grâce au mécénat, preuve que le Canal du Midi intéresse ?
Rien que pour replanter, on a besoin de 250 à 400 millions d’euros donc on est loin du compte. Nous, ce que nous proposons au club économique Toulouse au fil de l’Ô, c’est de déposer la marque Canal du Midi. Ça ferait rentrer des royalties, de créer une fondation internationale puisque c’est classé au patrimoine mondial de l’Unesco. On se rend compte depuis la conférence mondiale des canaux en 2013 que les canaux intéressent au niveau mondial et le Canal du Midi particulièrement.
Vous proposez de privatiser notre Canal du Midi ?
Pourquoi pas puisque l’Etat, depuis 20 ans, n’arrive pas à s’en occuper. C’est un Versailles de 250 kilomètres de long où l’eau coule toujours. L’eau, c’est la vie mais c’est aussi tous les problèmes liés à la vie : la pollution, les incivilités … La qualité de l’eau du Canal du Midi, on commence tout juste à s’en occuper.
L’Etat ne peut plus financer le Canal du Midi ni son entretien donc on le doit le laisser partir à vau-l’eau ?
Privatiser une partie du patrimoine, c’est l’exposer à d’autres risques.
Bien sûr. Il va falloir trouver un juste milieu. On n’a pas de financement aujourd’hui. L’Etat ne peut plus financer le Canal du Midi ni son entretien donc on le doit le laisser partir à vau-l’eau ? Ça, ça va être la meilleure façon qu’on perde le classement en 2019.
Magalie Lacombe France Bleu Toulouse