La commission d’enquête a émis un avis défavorable
au projet de classement des abords du canal du Midi.
En menant du 7 avril
au 21 mai une enquête
publique
consacrée au classement
des abords du canal du
Midi, la préfecture de Région
Midi-Pyrénées avait choisi
des mots ne pouvant prêter à
contestation : « Le projet doit
permettre de préserver des terres
agricoles viables, de concevoir
un organisme respectueux
des paysages, de développer
une activité touristique
équilibrée et durable. »
C’est à la demande de
l’Unesco que l’Etat français
avait initié la démarche, avec
la procédure de classement
au titre des sites. Une voie signifiant
la nécessité pour
tout porteur de projet sur la
zone de soumettre une demande
d’autorisation spéciale
à l’autorité préfectorale.
L’Aude était tout particulièrement
intéressée, avec 54 des
90 communes de ce classement
de 23000 ha, et un périmètre
d’une largeur moyenne
de 500 m de part et d’autre de
la voie d’eau. Et si la volonté
de protéger l’écrin paysager
pouvait difficilement susciter
une opposition, élus ou représentants
agricoles ont très vite
signifié leur opposition. Un
vent de fronde qui a pesé
dans l’avis négatif rendu au
cours de l’été par le président
de la commission d’enquête
et les commissaires enquêteurs.
ð Promesse de
dialogue de l’Etat
Leur avis n’a certes aucune
valeur contraignante. Mais
les conclusions pointent une
liste faramineuse de lacunes,
en s’étonnant que la préfecture
ait écarté les possibilités
d’user des autres outils urbanistiques,
des plans locaux
d’urbanisme aux schémas de
cohérence territoriale (lire
ci-dessous) : « (…) si le projet
constitue une protection efficace
des abords du canal, il
soulève de très nombreuses
oppositions et questions
aujourd’hui sans réponses. »
Le constat ravira sans doute
les 33 collectivités audoises
qui avaient émis un avis défavorable
ainsi que les représentants
agricoles. Les premiers
avaient dénoncé un empilement
de contraintes administratives,
faisant du canal un
« handicap » et non un
« atout » ; les seconds
avaient affiché leurs craintes
sur le bâti agricole et les restrictions
promises en matière
d’installation d’irrigation.
Des arguments développés
dans l’avis défavorable. Et
que la préfecture de Région
assure retenir : « L’Etat entend
les demandes de poursuite
des échanges avec l’ensemble
des collectivités et les acteurs
de la profession agricole
avant de mettre en place les
modalités les mieux adaptées
à la protection des abords du
canal ». Une promesse de dialogue
qui sera sans doute suivie
de très près dans l’Aude.
Avec, dans les jours à venir,
une conférence de presse annoncée
du préfet de Région.
Antoine Carrié
LES INTERROGATIONS ET CRITIQUES DE LA COMMISSION
P Choix du site classé.
« L’affirmation péremptoire,
portant sur le choix du site
classé, ne constitue pas, aux
yeux de la commission, la
démonstration incontestable
que le classement est la seule
solution capable de répondre
aux exigences de l’Unesco. »
P Protection. « Si l’Etat
avait été soucieux de la
protection du canal, il aurait
pu, depuis des décennies,
mettre en application les
dispositions prévues par la loi
ayant pour objet de
réorganiser la protection de
monuments naturels et des
sites. Il est surprenant que l’on
s’offusque de l’expansion non
maîtrisée de l’urbanisation,
alors qu’il y a plus de 40 ans,
était déclarée l’utilité publique,
par l’Etat, de l’A61 dont le
tracé, en plusieurs points se
situe à 20 m environ du
canal. »
P Communication. « Le fait
de limiter la démarche aux
seuls élus et à certaines
personnes publiques, en
ignorant la population et
particulièrement les
agriculteurs, et les
professionnels du tourisme et
des loisirs, réduit la portée de
la démarche et génère des
interrogations sur ses
conclusions optimistes. »
P Concertation. « La
commission ne peut que
constater l’indigence qui a
caractérisé la concertation en
amont du projet de
classement. Les réactions
négatives des élus et du
public apparaissent, dès lors,
compréhensibles ainsi que
leurs inquiétudes sur le
devenir du projet. »
extrait de L INDEPENDANT du 03.09.2015