Les arbres exotiques ont été jugés trop audacieux pour un monument historique en péril. Contrairement à ce qui était envisagé, on ne trouvera ni noix de pécan ni liquidambars flamboyants sur les berges du canal du Midi. Un « conseil scientifique » réuni le 17 septembre à Toulouse a tranché. Parmi les sept essences sélectionnées en 2012 pour remplacer les platanes victimes de l’épidémie de chancre coloré, seules deux variétés de chêne ont finalement été retenues. Elles seront plantées sur 40 % de l’itinéraire du canal historique qui relie Toulouse à Sète à la place des arbres malades. Outre cette « espèce-jalon », les peupliers blancs qui ont commencé à être plantés par le département de l’Aude ou les micocouliers dans l’Hérault vont se généraliser sur le reste de l’itinéraire. Les pins parasols qui jalonnent déjà le canal de la Robine du côté de Narbonne vont également se multiplier en direction de la Méditerranée. Au total, huit essences d’arbres vont se substituer à la monoculture du platane.
Ségolène Royal, ministre de l’Écologie, doit encore valider la décision, précise le préfet de la région Midi-Pyrénées. Pascal Mailhos, qui a été nommé préfet « préfigurateur » de la future grande région née de la fusion avec le Languedoc-Roussillon, veut accélérer le programme des replantations. « Il faut réduire les délais entre abattages et replantations. Choisir des essences locales permettra d’être plus rapide », se justifie le préfet. Le projet initial prévoyait une période probatoire d’une dizaine d’années pour tester les multiples variétés exotiques sélectionnées par des botanistes et paysagistes. La pépinière départementale de l’Aude avait fait part de son côté des difficultés à s’approvisionner en graines de plusieurs essences étrangères.
Patrimoine mondial
Si le représentant de l’État accélère le mouvement, c’est qu’il est pris en tenailles entre l’Unesco et les élus locaux. L’organisation internationale, qui a classé le canal du Midi au patrimoine mondial en 1996, demande des comptes à la France sur la protection de l’ancien canal royal du Languedoc, creusé il y a 350 ans sous le règne du Roi-Soleil. Mais les élus locaux des communes rurales riveraines, très attachés à leurs platanes centenaires, ont dit non au projet de classement d’une « zone tampon » de part et d’autre de l’ouvrage.
Le préfet de l’Aude a été chargé de jouer les diplomates pour calmer cette véritable « jacquerie » sur le canal du Midi. Il doit remettre ses conclusions en janvier 2016 aux élus de la nouvelle région. Le calendrier des chantiers arboricoles coïncide heureusement avec le calendrier électoral. En 2016, il y aura davantage d’arbres plantés que de platanes abattus, annonce le préfet Mailhos. Depuis le début de l’épidémie, signalée en 2006, plus de 13 000 des 42 000 platanes du canal sont passés à la tronçonneuse.
De notre correspondant à Toulouse, Stéphane Thépot www.lepoint.fr